La musique Il est difficile d'expliquer une musique, puisque par essence même, elle est créée pour être entendue. Cependant on peut dire que les compositions de Pierre Billon reflètent un style baroque, un son nouveau qui choque parfois à la première écoute. L'ensemble des chansons couvrant une période de trente ans, il est souvent nécessaire de se replonger dans l'époque pour en apprécier le côté novateur, presque expérimental . Par exemple, la présence des synthétiseurs à un moment où ils étaient peu utilisés, mais surtout l'emploi des instruments à contretemps : avec Pierre on électrifie les violons et on débranche les guitares, on ajoute des tempos et des accords inhabituels, on déstructure à plaisir les mélodies trop évidentes.Que ce soit pour Sardou, Hallyday ou d'autres, voire pour lui-même, Pierre s'est amusé à inventorier un nombre impressionnant de styles musicaux différents (de la country au pur rock, de la ballade à la bamba ). |
![]() Usant d'artifices en studio, il est
même parvenu à recréer le son d'une autre
époque, celui des sixties, comme il l'a fait en 1981 pour
les titres " Vogue " de Johnny. Une de ses principales
qualités en tant que compositeur/réalisateur est
d'avoir toujours su se mettre au service de ses interprètes
sans pour autant les dénaturer. Ainsi, si Pierre a offert
à Michel Sardou ou à Johnny Hallyday une couleur
musicale souvent inattendue, il a su préserver, voire
renforcer, les caractéristiques essentielles de ces deux
monstres sacrés. |
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Les images
et métaphores sont légion dans l'écriture
de Pierre Billon. Certains
textes peuvent paraître obscurs à la première
écoute car il ne faut pas les prendre au pied de la lettre,
ou du mot : il convient de les accepter comme une succession
d'images formant à elles toutes un tableau pouvant évoquer
aussi bien un aspect de la vie qu'un sentiment, voire un rêve. Ainsi dans " Gemini ", il crée une opposition entre la nature (les ruisseaux, le lichen, les oiseaux ) et la technique moderne. Mais ce n'est certes pas là le propos de la chanson : on y devine rapidement un climat d'amour et de regret - regret de n'avoir pas su faire mieux, de n'avoir pas pu donner libre cours à sa nature première. Pardonne-moi qu'on m'ait trop tôt brûlé les ailes J'aurais pu t'envoler Et rejaillir en aigle pour harponner le ciel. |
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Déclinaisons sur le temps La recherche d'un idéal,
d'une vie rêvée (ou le regret d'une vie vécue
jadis) est un leitmotiv des personnages que Pierre met en scène.
Dans " La bulle
", il demande
clairement : |
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Univers parallèles et personnages mythiques On remarque également
dans ses textes un goût assez prononcé pour des
univers irréels et fantasmagoriques : J'accueille à
bras ouverts ces monstres riants Femme cheval au corps
de libellule Dans les années
70, Pierre avait déjà dépeint un ange étrange
et très très " humain " qui aspirait
à goûter à tous les alcools, à fumer
et finissait par réclamer
des filles. (" L'ange ") |
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La femme et l'amour La femme revêt des aspects parfois
bien étranges dans les créations de Pierre Billon
comme dans " L'horloge
" où il effectue un travail
amusant sur les images : |
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L'animal Comme nous l'avions
déjà signalé, l'animal est évoqué
à de nombreuses reprises dans les chansons de Pierre.
L'aigle, solitaire et majestueux, apparaît dans ses textes
comme l'emblème d'une liberté enviée dont
l'homme ne jouit malheureusement pas toujours. Alors, il se prend
à rêver, comme dans "Petit Aigle", que
l'aigle tatoué sur son bras est un compagnon de voyage,
peut-être un guide: Je passerai des vacances
heureuses |
XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX Son Amérique à lui
Comme bon nombre de gens de sa génération, Pierre a idolâtré l'Amérique:
Mon second cur s'est mis à battre
Couleur de bannière étoilée. - " Les trois curs "
Mais une fois encore il est nécessaire de décrypter : il ne s'agit pas des Etats-Unis actuels, mais d'une Amérique ancestrale et fictive, chargée des clichés les plus représentatifs et sans doute les plus chéris par l'auteur. C'est un mélange savant de Fort Alamo et d'Easy Rider, de l'époque des pionniers au rock des années cinquante, où l'homme peut s'identifier à la fois à Elvis Presley, un indien ou John Wayne :
J'enviais la Triumph du voisin d'en face
En cirant comme un fou mon Perfecto tout neuf
J'me jouais West Side Story devant la glace. - " 46e rue ".
En cela, Pierre est assez proche de Johnny et leur traversée des USA ressemble à une épopée durant laquelle ils ont tenté de retrouver tous les symboles de leur Amérique :les vieilles villes du Far-West, les lieux mythiques, pas à cheval, certes, mais en moto et pas n'importe quelles motos, des Harley :
Un soleil rouge qui se lève
Sur les chromes d'une Heritage
Un cuir qu'on porte même dans ses rêves
Et Brando dans ses bagages
Le V-Twin qui sonne dans ma tête
J'ai pas besoin du reste
Pour rouler vers l'ouest. - " Rouler vers l'ouest ".
Récemment dans " l'Amérique de mes dix ans " Michel Sardou affirmait, nostalgique : " le Far-West n'est plus ce qu'il était ". Déjà en 1978, dans " 8 jours à El Paso ", une chanson dont Pierre avait écrit la musique, Michel regrettait de n'avoir quasiment rien retrouvé de l'Amérique de ses rêves :
Pas très loin des rives du Rio Bravo
J'ai pleuré tout seul dans ma tête
Ils sont loin les vieux chariots
T'es bien mort Pat Garrett.
En revanche pour des gens comme Pierre et sans doute comme Johnny, cette Amérique-là existera toujours puisqu'ils la " vivent ", qu'ils la portent en eux :
Je fais partie du décor
Et c'est Norman Rockwell qu'a tatoué tout mon corps.-" Rouler vers l'ouest".
Ceci peut paraître infantile à certains, mais c'est une grande qualité d'être capable de continuer à rêver :
Je suis l'indien blond
Je viens du fin fond du 12ème arrondissement
Je suis l'indien blond
Je descends du fond de mes rêves d'enfant. - " L'indien blond ".